LES PETITES BOITES, Cie LES MARCHES DE L’ÉTÉ – GLOB THÉÂTRE

Quand les comédiens sortent les maux de leur boite.

Comment montrer une société où nous sommes constamment envahis par la surinformation et touchés par l’impact des médias ? Comment dépeindre une société où la profusion des nouvelles que l’on nous délivre, conduit à notre propre isolement, voire même à la négation et à la négligence des êtres qui nous entoure ? C’est le défi que s’est lancé le metteur en scène Jean-Luc Terrade à travers sa dernière création, Les Petites Boites. Retour en mots et en images sur une pièce déconcertante, jouée du 4 au 13 mars par la compagnie Les Marches de l’été au Glob Théâtre.

Sept boîtes, sept individus. C’est dans un décor, certes minimaliste, mais efficace, que le metteur en scène choisit de faire jouer ses comédiens. A travers des boîtes mobiles, fil conducteur de la pièce, Jean-Luc Terrade dresse sept tableaux pour dépeindre des individus en crise, tentant vainement de communiquer entre eux. Au commencement ceux-ci déambulent, leur tête cachée dans les boites, leur identité masquée, uniformisés et conformes aux mêmes actions. « Comment confectionner une boîte ? » laisse entendre la voix off, alors que les comédiens, confinés au sein de cet espace étroit et inconfortable, regardent chacun dans le vide, sans remarquer la présence de l’autre.

Face au brouhaha incessant des voix des journalistes qui énumèrent des titres de faits divers de « dernière minute », le spectateur les surprend tout au long de la pièce, en proie à des actes de démence. Ils se jettent sur les murs en déclamant des répliques de Phèdre, sont pris de convulsions soudaines ou vomissent la boisson qu’ils ingurgitent. Ce sont encore ces mêmes personnes qui, transformées en automates, errent d’un pas nonchalant à travers les boîtes comme égarés dans un labyrinthe. Bref, c’est un certain malaise qui perdure tout au long de la pièce. Un malaise partagé entre les comédiens et le public, qui, en l’absence de scène proprement dite, se retrouve en confrontation directe avec eux.

A travers des performances particulières des comédiens, Jean-Luc Terrade montre ici la perte de l’identité de l’homme et de ses repères dans un monde où le flot d’informations et les réseaux sociaux parviennent à le fondre dans la masse et à l’engloutir. Son être devient bafoué, sa solitude renforcée, puisque personne ne prête attention à ses propres actes et pensées. Tout au long de la pièce, les comédiens sont vus mais pas regardés, entendus mais pas écoutés.

A ces scènes d’angoisse et de crise, sont ajoutées des scènes plus comiques, voire extravagantes, où les individus tentent de s’exprimer et de communiquer avec peine. Un homme danse de façon exubérante sur le titre symbolique de Queen « I want to break free », alors qu’un autre raconte des blagues grivoises sans que personne ne l’écoute. Dans un autre tableau, ceux-ci sortent de leur boite pendant un bref instant afin de se retrouver et danser de façon maladroite et désabusée.

A mon sens, l’utilisation des boites mobiles est un choix judicieux, puisqu’elle confère un certain dynamisme là où il y a une récurrence de scènes plus longues, sans paroles. La performance des comédiens est également à souligner. Afin de retranscrire les informations des médias et les divers témoignages, les comédiens mêlent leurs voix et enchaînent des sujets tous différents. Le spectateur est pris à son tour dans la confusion entre la quantité d’informations données, la multiplicité des tableaux, le fil du discours et l’intention de départ. Alors que les idées sont évoquées de façon très conceptuelle, on regrette le manque de simplicité et de retenue de cette pièce dans ce qu’elle veut montrer. En s’adressant à un public averti, on a alors l’impression de ne pas discerner réellement la critique et l’intention du metteur en scène.