Revue Akki . Happe:n

Akki, une nouvelle revue papier made in Nouvelle-Aquitaine

Entretien avec Laurent Bigarella, rédacteur en chef

Nouvel objet médiatique imaginé par nos confrères de Le Type, Akki arrive en décembre et nous promet de nouveaux récits sur les marges de la région Nouvelle Aquitaine. Tout cela sous le prisme de la culture, évidemment !

• • • D’où a émergé l’idée de concevoir AKKI ?

Laurent : « Cela fait un petit moment que ce projet nous trotte dans la tête chez Le Type. C’est vrai que nous nous sommes toujours envisagés comme un média web, puisqu’on est né en 2011 et que c’était un moyen formidable de se lancer à ce moment-là.

Aujourd’hui, même au niveau local, nous sommes de très nombreux médias à être présents sur le web, ce qui conduit parfois à se retrouver avec les mêmes articles traitant des mêmes sujets… Être en ligne c’est intéressant car on peut traiter l’actualité chaude, la réactivité est possible. Mais on se rend compte aussi que sur internet, les personnes vont cliquer sur un article mais ne vont pas nécessairement le lire jusqu’au bout. La disponibilité des internautes est finalement assez faible. Via un magazine ou une revue « en dur » il y a plus d’opportunités pour saisir le lecteur et le garder plus longtemps.

Le papier apporte une autre dimension qui vient répondre à un problème d’excès de contenus similaires. Avec Akki, on veut privilégier le temps long. Cela nous amène à prendre du recul sur les sujets que l’on traite pour les aborder autrement. Pour produire des analyses de fond « décorrélées » de l’actualité chaude, nous pensons que le papier est le format idéal.

Enfin, nous avons aussi eu envie de créer un objet tangible car nous sommes, dans l’équipe, des amoureux du papier. Nous trouvons qu’avoir entre les mains une revue ou un magazine a quelque chose de spécial. La question de l’objet à réellement compté dans la conception d’AKKI. »

• • • Que signifie « AKKI » ?

Laurent : « J’avoue que nous nous sommes pas mal tordu les méninges pour trouver ce nom. En effet, plusieurs éléments nous tenaient à cœur dans la recherche de ce nom.

Tout d’abord, on ne voulait pas appeler ça « Le Type » car même s’il s’agit d’un projet porté à 100% par notre collectif, nous souhaitions qu’AKKI ait sa propre identité.

Ensuite, nous avions en tête que la dimension territoriale primait : la ligne éditoriale (comme on le fait avec Le Type d’ailleurs) est particulièrement centrée sur la région Nouvelle Aquitaine. Au-delà de la métropole bordelaise, nous souhaitions traverser les frontières pour explorer l’ensemble du territoire.

Nous voulions également mettre en avant l’aspect alternatif de cette revue. Etant donné que nous proposons quelque chose de nouveau, nous souhaitions détourner quelque peu les codes alors nous avons opté pour cette orthographe : AKKI. »

• • • Comment et pourquoi les chroniqueurs ont-ils été castés, sélectionnés et invités à participer à ce projet ?

Laurent : « Les collaborations ont été assez simples. En juin 2020, nous avons publié un appel à contributions (c’est quelque chose qui se fait beaucoup dans le milieu des magazines et des revues). Il s’agit de présenter le projet en y précisant la thématique abordée pour proposer à des personnes de rejoindre l’aventure.

Une fois cette invitation à collaborer lancée, nous avons reçu un grand nombre de propositions d’articles. On a donc fait un tri en fonction des sujets qui nous paraissaient les plus pertinents et sensiblement rattachés au thème du numéro un : les contre-cultures.

Parallèlement, il y a eu deux autres entrées pour participer au projet : l’équipe du webzine Le Type a pu proposer ses articles et certains de nos chroniqueurs se sont vus associés à AKKI. Nous avions également repéré des personnalités et chercheurs qui traitaient du sujet que nous souhaitions aborder dans le premier numéro d’AKKI. Nous les avons alors contacté pour leur proposer une collaboration et certains ont répondu présents.

En définitive, sur AKKI nous avons une équipe composée d’une vingtaine de personnes : certains sont journalistes, d’autres chercheurs ou encore chroniqueurs bénévoles. Il n’y avait pas réellement de règle dans le « recrutement » de nos contributeurs, l’idée était de rassembler des personnes partageant nos valeurs qui souhaitaient prendre part à ce projet en écrivant sur la thématique des contre-cultures.»

• • • Comment se compose cette revue ? Certes il y a des écrits, mais y a-t-il des approches moins « conventionnelles » (photographie, illustration, élucubrations originales à la manière d’un fanzine) ?

Laurent : « Cette revue, nous l’imaginons hybride, à la croisée d’un magazine et d’une revue. Les pages s’alternent donc entre contenus assez longs (on ne s’interdit pas de faire des sujets de 8 pages !) et des formats plus légers. Il y a bien évidemment de la photographie pour illustrer les papiers ; d’ailleurs, nous sommes en train de réfléchir à une couverture qui sera une création photographique. D’autres formats viendront ponctuer la lecture : une frise chronologique illustrée, une tribune qui laisse la parole à une personnalité sur un sujet de son choix et un format « post-it » par exemple. »

• • • Pourquoi la thématique des contre-cultures ? Qu’inspire-t-elle pour l’ensemble des membres de la rédaction ?

Laurent : « Lorsque nous nous sommes posé la question sur la thématique du premier numéro, nous savions ce que nous voulions proposer dans le temps avec cet objet : documenter les marges de la Nouvelle-Aquitaine. L’idée est très clairement de mettre en lumière des projets locaux qui ne sont pas forcément valorisés par les médias que l’on peut qualifier de « classiques ». Cela est également dans l’ADN de Le Type car depuis notre création, nous avons toujours fait en sorte de parler des artistes et projets émergents.

Nous voulions que le thème du premier numéro soit également un marqueur pour les éditions à venir, qu’il devienne un fil rouge en quelque sorte. Notre choix s’est porté sur les contre-cultures car même s’il s’agit d’un terme « daté » (il était notamment utilisé dans les années 60-70), c’est un concept qui est très intéressant.

Finalement, il y a une double approche avec cette thématique : on peut aborder la question des cultures alternatives mais aussi de ce qui est relatif au subversif. Ainsi, on va interroger les normes, questionner l’underground, enquêter sur l’émancipation culturelle…

Tout cela a beaucoup inspiré notre équipe de contributeurs car, vous le verrez dans AKKI, énormément de sujets très variés y sont abordés. Ainsi, on va parler de musique, de cinéma, de culture hacker, de graffiti, de culture queer, de skateboard, d’architecture, de médias, de fanzine, de culture sexe…etc.

Avec cette thématique, nous pouvons parler de sujets pluriels à travers des approches très différentes. Finalement, la notion de contre-culture, on peut l’observer partout. Et cela permet une convergence des écrits, les papiers sont infusés de cet axe commun qui vient en filigrane sur toute la revue. »

• • • Bureau Nuits est à la direction artistique de cette nouvelle revue, peux-tu m’en dire plus sur cette collaboration ?

Laurent : « Bureau Nuits est un studio créatif de design graphique qui propose différents services portés sur la création visuelle, la photographie et la typographie.

Nous avions entamé un travail avec eux sur Scene city (projet qui vise à documenter les scènes locales européennes). Ils avaient produit un super travail d’identité visuelle et de création de supports pour l’ensemble de la communication relative à ce projet. Tout naturellement nous leur avons donc proposé de collaborer sur la direction artistique d’AKKI.

Parallèlement, nous avions eu entre les mains l’une de leurs créations sur un média qui s’appelle La Relève et La Peste, nous étions déjà convaincus mais cela a renforcé notre envie de travailler avec eux. Cette référence donne d’ailleurs à AKKI une légitimité supplémentaire car ils sont reconnus par leurs pairs dans le milieu. Pour l’anecdote, nous nous entendons également très bien avec Jules et Romain, les deux fondateurs de ce studio. »

• • • Parlons finance. J’ai vu sur KissKissBankBank que vous aviez l’ambition de récolter 9 000€ via des donations. Comment se répartit le budget ? Les chroniqueurs sont-ils rémunérés ?

Laurent : « Pour être transparent, l’édition d’AKKI nous coûte plus que 9 000€. Nous avons complété le budget avec des fonds que nous avions dans les caisses de Le Type pour ce lancement.

Sinon, pour être précis, la majeure partie du budget va permettre d’imprimer les 1 000 exemplaires de la revue. Nous avons choisi de les faire confectionner dans une entreprise locale, dont les ateliers sont basés en Gironde. Cela a un coût mais ça a du sens pour nous. Le reste de l’argent récolté permettra également de rémunérer Bureau Nuits pour le design graphique et le maquettage de la revue. Du merchandising est prévu également.

Malheureusement, nous ne rémunèrerons pas les chroniqueurs pour cette première édition dans le sens où nous devons assurer les coûts relatifs à ce numéro 1. Mais nous espérons que nous pourrons le faire dès le semestre prochain avec le numéro 2 ! »

• • • Pour finir, chez Happe :n nous portons également un projet de revue papier : Traversanne. Notre idée est de créer un objet tangible, qui laisse une trace dans le réel. Il s’agit aussi pour nous de s’éloigner de l’actualité brulante pour prendre du recul sur un sujet, une histoire et s’y intéresser en profondeur. Qu’est-ce qui nous pousse nous, webzines aux contenus « virtuels » à venir au papier pendant que les grandes rédactions optent de plus en plus pour de la diffusion numérique.

Laurent : « Je pense que ça recoupe avec ce que je te disais au début. Aujourd’hui, nous arrivons vraiment dans une période où il y a une saturation de ce qui est proposé en ligne (réseaux sociaux, blogs, webzines, médias en ligne…). Je pense sincèrement que l’on a besoin de prendre du recul, de faire un pas de côté face à l’immédiateté des informations proposées actuellement. Je vais faire un parallèle avec la musique. Il y a eu un retour du vinyle il y a peu et je pense que c’est un peu pareil dans le secteur des médias aujourd’hui.

Avec AKKI, nous avions envie de revenir à un objet « physique » grâce auquel il est possible de s’éloigner de nos ses écrans. Et revenir au papier, il me semble que c’est quelque chose d’important, notamment pour du contenu long…

Par contre, je ne dis pas qu’il faut retourner au papier dans tous les cas. Il est nécessaire de penser le projet : quel format pour quel contenu ?

Avec Le Type, ce qui est sur c’est que l’on va continuer sur le web. Mais les questions « de fond » seront davantage abordées sur AKKI. Ainsi, on peut creuser les sujets et prendre du recul sur les propos que nous recueillons. »

Campagne KissKissBankBank Akki | Page Facebook Le Type