Encas danse #2 – Le G-SIC à la Manufacture CDCN

Il y a quelques semaines je vous présentai le G-SIC, projet de danse amateur proposé par la Manufacture CDCN, chapeauté par  Jérôme Brabant et tutoré par Jimmy Monneron. J’y suis retournée et j’ai des choses à raconter !

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Je vous avais laissé entendre que j’enfilerais peut-être ma tenue de danse pour rejoindre les jeunes âgés de 13 à 20 ans sur le parquet mais manque de temps — ou mauvaise foi pour ne pas dire que je flippe un peu à l’idée de remuer mon corps devant un chorégraphe et un groupe d’amateurs déjà bien au fait des esthétiques enseignées —, je n’aurais passé qu’une demi-journée à la Manufacture CDCN, dissimulée derrière mon carnet de notes et mon ordinateur, pour suivre cette troisième session de répétition du G-SIC.

Jimmy Monneron – Un tuteur en action

Dans « Encas danse #1 – Le G-SIC à la Manufacture CDCN » je n’avais que brièvement cité Jimmy. Pourtant, c’est lui qui se consacre à la gestion du projet ! Danseur depuis une dizaine d’années, ce limougeaud âgé de 24 ans exilé à Bordeaux est en service civique depuis quelques mois à la Manufacture CDCN. Échanger avec lui, c’est comprendre les enjeux du G-SIC mais aussi et surtout tout savoir sur ce projet de danse amateur ! Présent sur tous les temps de répétition (4 weeks-end dispersés de février à juin 2019), il scrute, étudie et analyse chaque geste, parole ou agissement des jeunes embarqués dans l’aventure. L’idée est que ce tuteur, danseur autodidacte à l’univers singulier, accompagne le chorégraphe dans sa mission et les jeunes dans ce voyage chorégraphique bordelais.

© Photo par Pierre Benais

Pour lancer le G-SIC, Jimmy a d’abord fait un gros travail d’information en maillant le territoire à la recherche de jeunes ayant l’ambition de s’investir dans un projet de la sorte. Difficile de trouver une quinzaine de jeunes intéressée par la danse contemporaine, encore plus quand on sait que cette démarche artistique s’inscrit sur un temps long et demande un investissement tant physique que moral. Le travail paye car finalement une dizaine de jeunes est présente chaque week-end. Pour lui, c’est une vraie richesse de proposer à des adolescents de participer à un tel processus de création. Il remarque que Jérôme installe de réelles conditions professionnelles dans lesquelles évoluent les danseurs du G-SIC. Pourtant, ces amateurs ont pour certains aucune pratique de la danse. Parce que ce qui est résolument important ce sont les réflexions artistiques et la recherche chorégraphique, plus que la restitution finale. Il est définitivement convaincu que la richesse de cette expérience participe à la construction des parcours des jeunes qui participent au G-SIC. Jimmy qui est autodidacte, a commencé le breakdance seul et s’est bâti un univers propre sans guide au début. Après des dizaines d’auditions auprès de compagnies locales ou internationales, il a pris goût à la scène. Mais ce sont surtout la complémentarité de sa formation professionnelle chez Adage et sa pratique d’ « autodidacte » qui lui ont permis d’être un artiste complet. Les cours, masterclass et autres pratiques professionnelles guidés par des chorégraphes d’horizons différents ont permis de parfaire son esthétique. Pour lui, c’est par les rencontres, les réflexions artistiques et les recherches chorégraphiques qu’on arrive à construire quelque chose d’intéressant. Ainsi, le travail que Jérôme mène auprès des jeunes du G-SIC permet de les intégrer dans un processus quasi-professionnel, une richesse que peu d’amateurs ont la chance de connaître et qui leur servira à l’avenir.

Le G-SIC – Dévoiler des talents

Quelques jours avant cette troisième session d’entrainement, Jérôme a performé sur la scène du Pôle Ev@sion d’Ambarès. Un spectacle auquel la majorité des jeunes du G-SIC a assisté, entourée d’un public de curieux. Leur enthousiasme était grand quand nous en avons discuté : en plus d’avoir été impressionnés par la performance de Jérôme Brabant et Maud Pizon, ils comprennent désormais beaucoup mieux ce que propose le chorégraphe qui les guide. Pour Jimmy, le changement qui s’est opéré est grand : avoir assisté à la représentation de cette pièce chorégraphique a permis de voir les initiateurs de A Taste Of Ted performer en direct sous leurs yeux. Au-delà du spectacle, pouvoir appréhender l’énergie des danseurs — Jérôme et Maud — et du pianiste qui les accompagne a été un vrai déclencheur. L’apprentissage des danseurs en herbe est désormais beaucoup plus fluide. Certains des adolescents qui participent au projet n’en ont pas conscience mais d’autres avouent mieux comprendre la direction dans laquelle aller. Même s’il s’agit d’une ré-écriture de A Taste Of Ted, percevoir la finalité de la performance initiale permet aux jeunes de se projeter dans un travail plus palpable.

Aperçu des coulisses – La découverte d’un univers singulier

Cette création collective, guidée par Jérôme et accompagnée par Jimmy, s’accomplit dans un cadre convivial. La technique n’est pas au centre des préoccupations car la recherche chorégraphique mêlant l’univers dansé de Jérôme et l’imagination des jeunes du G-SIC permet une création commune riche. Après avoir étudié l’identité forte de A Taste Of Ted via un travail basé sur des éléments vidéo, musicaux et d’archives, les participants à ce voyage chorégraphique unique développent un réel lien affectif avec la danse. Cet attachement se voit aussi dans la complicité qui s’est créée entre les jeunes mais aussi avec Jérôme. Il est vrai qu’à l’origine, Jimmy avait pour mission d’assister le chorégraphe dans son processus de transmission auprès des adolescents ; mais aujourd’hui, l’entente est réelle, autant entre le chorégraphe et les jeunes du G-SIC qu’entre les membres du groupe eux-mêmes : le tuteur n’interfère alors pas dans le processus de recherche et d’apprentissage en cours. En effet, lorsque j’assiste aux répétitions, la complicité est frappante. Jérôme est en écoute permanente des pensées et dires de chacun. Ainsi, la transmission est bien plus fluide et l’appropriation des techniques proposées par Jérôme sont rapidement assimilées par les adolescents.

Participer au G-SIC c’est un moment hors du temps pour les jeunes qui y prennent part. En effet, adapter ce duo unique à un groupe amène des doutes et des incertitudes. Mais avoir la possibilité de s’emparer du travail technique et créatif provoqué par Jérôme c’est explorer une nouvelle approche et se questionner différemment. Pour Jimmy, le G-SIC c’est la vision d’un chorégraphe ré-interrogée confrontée à une dynamique nouvelle qui s’approprie une identité particulière. Travailler sur A Taste Of Ted c’est finalement s’ouvrir à une histoire et un patrimoine inconnus pour les participants. C’est également penser la danse autrement : l’écoute au centre des préoccupations et l’entraide comme pilier de la création collective.

Le G-SIC c’est finalement une réelle aventure chorégraphique pour Nina, Zakary, Nils, Oïahana, les deux Eléna, Jimmy et Jérôme. Mais c’est bientôt la fin ! Le prochain week-end de répétitions aura comme point d’orgue la représentation finale devant le groupe du G-SIC de Tours, qui mène un travail similaire au Centre Chorégraphique National de Tours. Hâte de voir ça ? Rendez-vous dans quelques semaines sur happen.fr !